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Comment concilier humidité et pérennité du bois ? Un matériau performant

Comment concilier humidité et pérennité du bois ?

Mis à jour le 24 janv. 2024 à 15:34:03

Comprendre le comportement du matériau bois face à l'humidité et appréhender les bonnes pratiques pour une application à l'épreuve du temps.

La gestion de l’eau dans les applications du bois nécessite des connaissances fines pour ne pas risquer d’altérer l’intégrité des éléments en bois. Il est important de maîtriser le comportement hygroscopique du matériau et de respecter les solutions pour mettre en œuvre du bois dans des conditions humides. Si le fait de protéger le bois d’une stagnation d’eau est une des clés, découvrez comment concilier humidité et pérennité du bois, quel qu’en soit l’usage.

Maîtriser le comportement hygroscopique du matériau

S’il faut protéger le bois d’une stagnation d’eau et de conditions humides fréquentes et durables, c’est parce que le matériau réagit avec l’eau liquide ou ambiante. Certaines essences sont plus ou moins durables et supportent ainsi mieux les conséquences d’une humidification : c’est pourquoi il existe des solutions pour mettre en œuvre du bois dans des conditions humides. Mais il est nécessaire de comprendre en amont les mécanismes qui rendent le bois sensible à cette humidité.

Le bois, en tant que matériau issu du vivant, contient naturellement de l’eau. Cette eau est nécessaire au fonctionnement de l’arbre, et notamment à l’accomplissement de la photosynthèse, qui lui permet de grandir. Ainsi, quand on coupe un arbre, il n’est pas rare que son poids soit majoritairement lié à l’eau qu’il contient (au même titre que le corps humain est composé à 60 % d’eau liquide environ).

Aussi, même après récolte, transformation et mise en œuvre, le bois est un matériau dit hygroscopique, c’est-à-dire qu’il échange de l’eau avec l’environnement extérieur (que l’eau soit sous forme liquide ou gazeuse). Tout au long de la vie du produit bois, ces échanges vont perdurer, faisant varier la quantité d’eau à l’intérieur du matériau. C’est aussi cette caractéristique qui permet à des constructions bois de réguler l’air ambiant, pour permettre aux usagers de vivre dans un environnement qui n’est ni trop sec, ni trop humide. C’est un des avantages du bois sur le plan sanitaire, et une des raisons de l’amélioration de la qualité de l’air intérieur.

Pour déterminer la quantité d’eau dans le bois, on parle de taux d’humidité, exprimé en pourcentage. Vu que les échanges varient constamment, ce taux est lui aussi perpétuellement en évolution. Toutefois, si les conditions de l’air ambiant (température et humidité de l’air) sont relativement constantes, alors le bois va stabiliser sa quantité d’eau à une humidité dite d’équilibre. À titre d’exemple, lorsque l’air dans une pièce a une température de 20 °C et 65 % d’humidité, alors le bois mis en œuvre dans ces conditions va atteindre à terme environ 12 % d’humidité. S’il fait plus chaud ou plus froid, et que l’humidité de l’air varie aussi, alors le bois va aussi adapter sa propre humidité.

Ainsi, pour chaque catégorie de produit, une humidité d’équilibre théorique est souhaitable : par exemple, les lames de parquet ou de mobilier intérieur se doivent d’être plus sèches (de l’ordre de 5 à 8 % environ) que des poutres structurelles que l’on trouve sous la couverture d’un toit (de l’ordre de 15 % en moyenne).

Il faut toutefois comprendre que, si l’humidité est un facteur important à prendre en compte quand on utilise du bois, ce dernier peut s’avérer tout à fait adapté dans des conditions humides. Ainsi, des conseils sont prodigués pour utiliser des essences ou produits adaptés dans les pièces d’eau. Qu’il s’agisse d’aménagements de cuisines ou de salles de bain, pour des usages intérieurs, et même de piscines pour des usages extérieurs, des solutions existent.

Photo d'une salle de bain intégrant le bois en parquet, en aménagement et au plafond.

© Diptyk Architectes

Pour finir, un bois qui oscille entre 0 % (Valeur théorique qui est inatteignable, à moins de dégrader le matériau.) et 30 % environ va subir, telle une éponge, des variations dimensionnelles et des déformations. C’est bien l’un des enjeux majeurs de la maîtrise de l’humidité d’un bois, afin d’éviter des désagréments de ce type.

Protéger le bois d’une stagnation d’eau, pour éviter les variations dimensionnelles

Il est important de comprendre comment concilier humidité et pérennité du bois, car les changements d’humidité du bois causés par l’air ambiant vont engendrer des variations dimensionnelles et des déformations. D’où l’importance aussi de connaître les solutions pour mettre en œuvre du bois dans des conditions humides.

En séchant, le bois se rétracte. En s’humidifiant, il va naturellement gonfler… C’est lié aux molécules constitutives du bois (dont la cellulose), qui vont absorber ou relâcher de l’eau, en fonction de l’humidité ambiante. En fonction de l’état d’humidification, les dimensions vont donc varier, jusqu’à l’échelle macroscopique…

Si ces variations d’humidité sont trop brutales, cela peut occasionner des changements de dimensions importants et des déformations qui peuvent remettre en cause l’usage même du produit bois : gondolement, tuilage, etc. Cela fait partie des déformations qui peuvent affecter des pièces de bois, selon aussi l’orientation des cernes. Après de telles modifications, cela peut entraîner un sinistre dans le bâtiment (ex. : altération de l’étanchéité du bâtiment, parquet à remplacer, etc.).

Pour limiter le risque, il faut que l’humidité du bois à la pose soit proche de son humidité d’équilibre. C’est pourquoi il faut vérifier auprès de son fournisseur et/ou poseur l’humidité du bois lors de la mise en service. C’est aussi la raison pour laquelle il faut mettre en œuvre du bois déjà sec, car, une fois à l’intérieur des bâtiments, du bois initialement trop humide va sécher fortement et se rétracter en conséquence dans des proportions souvent non souhaitables.

Aussi, par rapport aux variations dimensionnelles qui sont inhérentes à tous les produits bois, il est nécessaire de laisser un jeu entre les pièces de bois, pour leur permettre de se dilater sans être altérées, en cas d’humidification. C’est par exemple le cas lors de la pose d’un parquet.

Il existe de nombreux documents pour aiguiller les maîtres d’œuvre et entreprises dans la bonne conception vis-à-vis de l’humidité et la bonne compréhension des phénomènes qui rentrent en jeu. Par exemple, les ressources du CNDB dédiées à la gestion de l'humidité.

Enfin, de nombreux produits à base de bois peuvent faire l’objet de traitements ou de mixités avec d’autres matériaux, pour les rendre beaucoup moins sensibles à l’eau. C’est le cas des traitements à haute température, qui permettent aux bois de devenir insensibles à l’eau. On peut aussi envisager l’application de produits composites, tels que les bois-polymères : les fibres de bois sont alors mêlées à une matière plastique, ce qui empêche tout contact entre ces fibres et l’eau. Ces produits sont alors très stables d’un point de vue dimensionnel.

Avoir une bonne gestion de l’eau dans les applications du bois, pour éviter les altérations

Maîtriser le comportement hygroscopique du matériau est essentiel, pour éviter des sinistres qui peuvent être causés par des agents biologiques, notamment si on n’a pas protégé le bois d’une stagnation d’eau. D’où la question cruciale : comment concilier humidité et pérennité du bois ?

Si elle est trop abondante, l’eau est un facteur qui va favoriser une attaque fongique sur une pièce de bois. Ainsi, avec un taux d’humidité du bois supérieur à 20 %, le risque de développement d’un champignon apparaît, ce qui n’est pas le cas pour des taux inférieurs, qui sont normalement respectés lors de toute mise en œuvre.

Parmi les agents qui peuvent s’attaquer au bois, on distingue :

  • Les agents de bleuissement, qui vont altérer l’aspect esthétique du bois, en lui donnant une coloration bleue en surface. Ces agents n’entraînent pas de diminution de la résistance mécanique du matériau ;
  • Les moisissures, qui vont occuper la surface sans altérer le matériau, mais peuvent poser des problèmes de qualité de l’air intérieur ;
  • Les champignons lignivores, qui vont attaquer la structure même du bois, et peuvent ainsi remettre en cause l’intégrité du matériau.

C’est pourquoi, en fonction du risque d’humidification prolongée du bois ou de stagnation d’eau, il faut choisir des essences de bois suffisamment durables (soit naturellement, soit après traitement), selon des classes d’emploi définies.

À lire sur le sujet : Usages du bois : Placer la bonne essence au bon endroit

En complément du choix de l’essence, des solutions techniques existent pour protéger le bois d’une stagnation d’eau. Par exemple, les lames de terrasses doivent avoir un profil légèrement bombé pour empêcher la présence de flaques. Même pour la durabilité des bardages, une pose verticale va faciliter l’écoulement de l’eau dans le sens des cellules du bois, alors qu’une pose horizontale peut engendrer des pièges à eau.

Il est aussi recommandé d’empêcher tout contact entre le bois et le sol, pour éviter des remontées d’eau par capillarité. Pour un revêtement bois, il est préconisé de laisser un espace d’au moins 20 cm entre le sol et la base de revêtement, afin d’éviter qu’il ne pourrisse.

Vidéo : Gestion de l'humidité dans l'application bois à l'extérieur : bardage, terrasse, aménagement extérieur

Pour des poteaux, une mixité avec d’autres matériaux comme le métal peut ainsi permettre de construire des éléments structurels pérennes, sans risquer de dégrader leur base.

Photo d'un hall extérieur en structure bois utilisant des pieds en metal pour assurer la pérénité du bois.

© Nicolas Waltefaugle ; Haha Atelier d’Architecture.

Une fois mis en œuvre, le bois en extérieur peut aussi faire l’objet d’un entretien spécifique, pour augmenter un peu plus sa durée de vie. Des conseils sont aussi à votre disposition pour l’entretien de votre piscine.

Photo d'une piscine intérieure avec un sol bois et des aménagements décoratifs en bois brut au plafond et sur les murs.

© Diptyk Architectes

En outre, les constructions d’aujourd’hui doivent permettre de maîtriser la diffusion de la vapeur d’eau à travers les murs. En effet, des échanges d’eau se passent à travers les parois, entre l’extérieur et l’intérieur d’un bâtiment. Or, si une couche de cette paroi bloque cette transmission de vapeur, il y a un risque de condensation d’eau à l’intérieur même de la paroi (par exemple dans l’isolant, dont les performances se retrouvent alors dégradées). Cela peut aussi engendrer des sinistres, d’autant plus que ce problème n’est pas immédiatement visible. D’où l’importance de faire appel à des professionnels qui maîtrisent aussi cet aspect du bâtiment.

Pour la même raison, il est essentiel de maîtriser cette diffusion de vapeur d’eau lorsque l’on rénove un bâtiment. Si de nombreuses opérations ont vu l’ajout d’une isolation par l’extérieur, la nature de l’isolant ou encore celle du mur initial sont clairement à considérer en amont, pour s’assurer de ne pas bloquer la vapeur d’eau au sein du nouveau mur isolé. En neuf comme en rénovation, il est crucial de respecter la « perspirance » des parois.

Quoi qu’il en soit, il est essentiel que les bois, dès leur mise en œuvre, aient une humidité inférieure à 20 %. Il faut aussi maîtriser la conception du bâtiment, pour éviter tout risque de condensation qui ferait augmenter cette humidité au-delà de 20 % de manière permanente.

L’usage de ces bois secs permet ainsi d’éviter tout risque de dégradation fongique, et limitera le retrait dimensionnel lorsque le bois va naturellement sécher lors de son utilisation.

On voit donc bien que l’humidité n’empêche clairement pas des usages très diversifiés du matériau bois, même dans des conditions où l’eau est particulièrement présente. Il faut toutefois en comprendre les interactions pour réfléchir en amont à des solutions adaptées à la pérennité de l’ouvrage.